Le marché du co-working n’est plus du tout l’histoire de quelques start-uppeurs qui partagent les locaux entre entrepreneurs indépendants.
C’est désormais une affaire de grands et même de quelques grandes multinationales.
Wework (un géant américain), Spaces, Nextdoor adossé à Bouygues et Accor, Kwerk, Starway (Posteimmo), Blueoffice (Nexity), Secondesc, Regus, Icade, Hub-grade, Deskao ou Morning Coworking se partagent le nouveau marché du co-working.
Comme pour tout nouveau métier, les gestionnaires traditionnels réalisent parfois les acquisitions de compétences et du savoir-faire. Blackstone a acheté The office groupe et Carlyle un opérateur de co-working pour lancer Uncommon.
En deux ans, 140.000 m2 de nouveaux espaces de co-working ont été créés à Paris-Ouest et les transactions ont explosées.
C’est encore une goutte d’eau dans l’offre du tertiaire Paris-Ouest (3% en m2 et 5% en part de marché). Mais, cette part de marché croit dans tous les pays, elle a atteint déjà 20% à Londres.
Le marché enregistre une croissance de plus 80% d’espaces de ce type en deux ans en France qui rattrape son retard.
Pourquoi un tel succès du co-working?
Ce n’est pas la formule de bureau la moins chère, mais une formule qui permet de faire des économies autrement.
Le coût du m2 est supérieur : 1214 euros m2 au lieu de 920 euros pour un bureau traditionnel.
Mais, les gestionnaires de ces bureaux avancent les économies allant de 30-50% .
Pourquoi? Ils comparent la totalité des coûts des espaces traditionnels.
Cette économie provient de deux éléments :
1. La mutualisation des espaces payés à la carte (la photocopie, la salle de réunion…)
2. Le ratio de mètre alloué par poste qui est de 7 m2 seulement en co-working.
En dehors du coût, le succès vient aussi d’un autre phénomène : la transparence de la facturation.
Il est facile de dégager une hiérarchie des coûts d’utilisation et des services, qui vont de 350-2300 euros/poste selon les services facturés.
Du moins cher au « full service » avec la restauration, des salles de réunions, un certain nombre d’impressions et la téléphonie inclus.
Qui sont les clients ?
Les sociétés de plus de 50 salariés travaillant en mode projet sont les principaux clients (51%).
Ces formules sont bien plus souples que le traditionnel bail commercial inflexible.
Mais bien entendu, les indépendants et les free-lances sont également des cibles naturelles.
Autre phénomène d’attraction à noter :
Thales, Casino se servent des locaux agréables de Wework pour attirer les jeunes talents qui rechignent devant 1 heures de RER pour atterrir dans des bureaux à l’ancien, sans effet waouh et sans rooftop pour les longues soirées d’été ! Il faut parfois un petit plus attirer les profils rares.
Les concepts marketing et les offres actuelles en co-working:
Certaines sociétés misent sur le « tout en un », d’autres sur le forfait bureau sec à minima avec options de service. Mais ce qui compte aussi, c’est le ‘concept’.
Pour Wework c’est un plus communautaire :
“Les clients sont les “colocataires”.
“Un bel immeuble au design moderne, une méthode pour favoriser la communauté et les liens, la flexibilité maximale dans les admissions et les départs”.
A partir de 350 euros par mois un bureau mobile (hot desk) ou attribué, le wifi bien sûr, mais aussi l’utilisation de l’imprimante et du téléphone, le café et les corn-flakes à volonté. Et last but not least, l’accès à tous les espaces WeWork dans le monde et une application faisant le lien entre les membres et les services pour 45 euros par mois.
Les conférences et “meet up” se multiplient pour favoriser les rencontres professionnelles.
Le nouvel espace (trop grand pour être cosy) se situe dans le hype SoPi (South Pigalle). Mais une salle de réunion pour 20 euros pour 30 minutes, cela chiffre vite. Puis, victime du succès, le lieu est une vraie usine où il faut chercher son hot desk chaque matin dans les étages.
Et en hiver, on a un peu froid dans les espaces pas toujours bien conçus, sans un chauffage efficace. Les ‘colocataires’ sont souvent assis au milieu des courants d’air.
Kwerk utilise le concept wellworking, wellness et coworking en offrant une palette de service bien-être (yoga et méditation, salles de fitness).
La Foncière des régions utilise les codes hôteliers pour ces espaces flexibles et de co-working..
Ce qu’il faut retenir : les codes du marketing de co-working ont gagné le marché des bureaux.
Le modèle évolue aussi vers un modèle hybride
Le modèle hybride mêle des espaces de coworking en rez-de-chaussée et des bureaux avec réservation à la demande des entreprises aux étages supérieurs.
La taille de locaux tend à croître, en moyenne vers 4000m2 ou plus..
Les formules de co-working répondent aussi à une autre problématique des métropoles : la durée de trajet.
Avoir un seul site dans une lointaine banlieue signifie pour une grande partie du personnel de faire le choix de 2-3 heures de trajets par jour.
Alors que pouvoir offrir plusieurs adresses professionnelles qui rapproche des lieux d’habitation permet de gagner en qualité de vie en sélectionnant les locaux les plus proches.
C’est déjà le cas de certaines entreprise américaines qui ont signé les contrats avec les géants de coworking en offrant ainsi à 2000 salariés une trentaine d’adresse pour travailler.
Ces locaux dans les hyper-centres urbains pourraient à terme devenir très recherchés.
Répartition territoriale, quelle perspective?
La véritable interrogation est celle qui est pose par le Président de la fondation Travailler autrement et concerne aussi la fracture territoriale.
Nous assistons à une triple transformation numérique, écologique, sociétale dans laquelle les Français sont à la recherche d’un nouvel équilibre et donc aussi à travailler autrement.
En deux ans plus de 1000 nouveaux espaces de type co-working ont été créés. Cette tendance avec le télétravail, peut-elle redonner aussi la vie à certains territoires ?
Ceci n’est pas certain vu le point précédent. On observe surtout la demande sur les zones urbaines denses et des hypercentres urbains. Ceci étant concomitant à l’accès à un bassin de recrutement important pour rentabiliser les espaces de plus en plus grands.
Comme nous avons écrit dans un de nos billets précédents, ces espaces rivalisent parfois d’imagination.
Mais, c’est un laboratoire intéressant de recherche d’aménagement, malgré un certain bricolage technique qu’on observe encore trop souvent.
Une mauvaise conception de locaux ne peut pas être masquée par quelques baby-foots.
Elle finit pas faire fuir les ‘colocataires’. Il est difficile de travailler dans les espaces trop froids en hiver, dans les courants d’air, dans la chaleur en été et dans un bruit de fond permanent faute de conception acoustique appropriée. La décoration de type loft ne fait pas tout.
Il ne faut pas oublier, après le co-working se profile à l’horizon le coliving.
Le phénomène est encore surtout anglo-saxon, mais dans d’autres pays européens que la France, la concurrence est déjà installée (Lyvly ou The Collective).
Quelques articles et sources à lire:
Etude sur le co-working en IDF : https://www.arthur-loyd.com/publications,c643/le-coworking-a-paris-et-idf-un-marche-en-plein-essor,livre2/
Le POint : http://www.lepoint.fr/economie/le-developpement-du-coworking-s-accelere-en-france-16-04-2018-2211008_28.php
Xerfi : https://www.xerfi.com/presentationetude/Le-marche-des-centres-d-affaires-et-du-coworking-a-l-horizon-2020_7SAE46
challenges : https://www.challenges.fr/entreprise/vie-de-bureau/comment-les-codes-du-coworking-sont-en-train-de-gagner-tout-le-marche-des-bureaux_573023